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Vincent Merling : « Je n'ai aucun problème avec la Fédération »
Candidat à la succession de Paul Goze à la tête de la LNR, le président du Stade Rochelais Vincent Merling regrette d'être étiqueté comme un simple opposant à la FFR. Et explique vouloir mettre en place une gouvernance participative de la Ligue s'il est élu.
merling (vincent) (A.Reau/L'Equipe)
Yann Sternis, envoyé spécial à La Rochelle
18 mars 2021 à 00h05
Homme rare dans les médias, Vincent Merling a accepté mardi d'ouvrir les portes de son bureau de l'Apivia Parc, le centre d'entraînement du Stade Rochelais, pour évoquer les motivations de sa candidature à la présidence de la LNR, dont l'élection est prévue mardi prochain.
Détendu avant l'entretien, plaisantant avec l'un des entraîneurs Grégory Patat au détour d'un couloir, le dirigeant s'est ensuite montré plus grave au moment d'évoquer les problématiques du rugby pro. Investi, il partira dans la foulée de l'interview à la rencontre d'un président de Pro D2.
« À quel moment vous êtes-vous décidé à être candidat à la présidence de la LNR ?
Ce n'est pas une décision prise avec une visée carriériste. Vous savez, je suis bien dans mon club. Mais, après que Pierre-Yves (Revol, président de Castres) a décidé de ne pas se présenter à l'élection, j'ai eu des demandes pressantes d'autres dirigeants. Je ne m'y attendais pas. Je ne suis pas un homme public, dans le sens où je n'ai pas l'habitude de m'exposer. Être mis en valeur, ce n'est pas dans mon tempérament. Mais je me suis demandé si ce n'était pas de mon devoir d'accepter cette démarche qui m'était proposée.
À votre avis, pourquoi ces présidents vous ont demandé de vous présenter ?
Je ne sais pas... Peut-être est-ce l'image du Stade Rochelais qui me projette comme un dirigeant légitime. Ce que je leur ai dit, c'est que ma philosophie de gouvernance serait basée, si j'étais élu, sur le participatif et non le directif. Mon devoir serait d'animer, de proposer, sur des thématiques précises, d'être dans le partage, la délégation de la compétence pour continuer à faire grandir le rugby français. L'exemple vivant de ma philosophie de gouvernance et de gestion participative, c'est le Stade Rochelais.
On vous a parfois présenté ces dernières semaines comme influencé par Jacky Lorenzetti, votre homologue du Racing...
Il est vrai que des présidents m'ont appelé pour me demander de me présenter. Jacky, avec qui j'entretiens de bonnes relations, en fait partie. Mais je ne suis pas l'homme de Jacky, je n'aime d'ailleurs pas qu'on dise que je suis l'homme de quelqu'un, je trouve ça péjoratif. Je suis Vincent Merling, un homme qui vit dans le rugby depuis toujours, un homme de partage.
Jacky Lorenzetti, président du Racing, et Vincent Merling, il y a deux ans. (N.Luttiau/L'Equipe)
Au quotidien, aviez-vous l'habitude de vous intéresser au fonctionnement de la Ligue ?
À l'origine de sa création, j'ai participé à faire adopter le 60-40 (60 % de la répartition des droits télé aux clubs de Top 14, 40 % pour ceux de Pro D2), on m'a longtemps appelé Monsieur 60-40, je suis très marqué Pro D2. Je me suis ensuite occupé d'une commission éthique, mais j'ai vite compris que ça ne servait pas à grand-chose, tout est éthique, c'était compliqué... Après, j'ai pris du recul, j'avais besoin de m'occuper du Stade Rochelais. Mais j'ai toujours été prêt à faire valoir mes convictions.
Est-ce que les tensions qui ont resurgi l'automne dernier avec la FFR autour de la mise à disposition des internationaux vous ont poussé à vous investir davantage ?
On peut parler de mes prétendus problèmes avec la FFR. J'ai un profond respect pour la Fédération. J'ai effectivement parfois des divergences de vues avec les dirigeants, mais en tant que président du Stade Rochelais. En tant que président de la Ligue, si je suis élu, je me devrais d'être en soutien de la Fédération et particulièrement de l'équipe de France, que tout le monde souhaite voir devenir championne du monde.
On vous a souvent caractérisé dans cette campagne comme le candidat de l'opposition à la FFR, ça vous gêne ?
Je ne suis pas quelqu'un de clivant, j'aime partager, batailler, mais je ne suis pas anti-Fédération. Ça serait faire preuve d'inintelligence, d'irresponsabilité. C'est facile de dire qu'avec moi, ça serait la guerre. J'ai cette image parce que je suis parfois monté au créneau, ce qui me sanctionne aujourd'hui auprès de certains présidents. Mais si je suis élu à la présidence de la LNR, je nommerai un vice-président en charge des relations avec la FFR. Non que je ne puisse le faire, mais afin de renforcer notre collaboration. Je serais un président cherchant à construire. Je le répète : je n'ai aucun problème avec la Fédération. En cas d'élection, mon premier appel serait d'ailleurs pour la FFR, afin de les saluer.
Un dialogue serein vous semble donc possible entre les deux instances ?
Je suis pour le dialogue, on peut parfois batailler, mais avec la volonté de trouver un chemin consensuel. Pour cela, il faut que chacun ait des cartes dans sa main, sinon, la discussion s'arrête vite. Mon devoir serait de défendre les intérêts des clubs, dans l'intérêt supérieur du rugby.
Si vous êtes élu, quel serait votre chantier prioritaire ?
La priorité, c'est de sortir de la crise et qu'on ne laisse personne au bord du chemin. En tant que président en activité, je ne pense qu'à ça. Il faudra nous recentrer sur le soutien du gouvernement, sans qui on ne s'en sortira pas. Il faut qu'il comprenne qu'avec ces matches à huis clos, nous sommes dans la même problématique que lors du premier semestre, 70 % de notre chiffre d'affaires ne peut être réalisé. Que ce soit avec le fonds billetterie, le fonds de solidarité et le fonds de compensation des charges fixes, il faut absolument que le gouvernement nous soutienne encore.
Je remercie par ailleurs l'équipe en place à la LNR d'avoir réussi à nous donner de la vision avec le nouvel accord de droits télés signé avec Canal+ (jusqu'en 2027). Ça va permettre aux clubs de solliciter leurs banques et d'emprunter avec cette caution forte. Il faudra également se pencher sur les baisses de masses salariales - avec ou non baisse du salary-cap -, que la DNACG assouplisse ses règles au moment où la crise nous affecte. Il sera également nécessaire d'inciter le public à revenir au stade quand ce sera possible.
Vous avez une crainte que le public ne revienne pas de la même manière qu'avant la pandémie ?
Je pense qu'une fois que la campagne de vaccination aura atteint ses objectifs, il y aura moins de souci. Mais en septembre, nous nous sommes aperçus qu'il y avait une inquiétude de nos supporters face à cette pandémie. Je comprends ces craintes, la Ligue devra accompagner les clubs pour favoriser le retour du public dans les stades en toute sécurité. C'est essentiel pour le rugby. »
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Au Stade Rochelais, une succession organisée
Président du Stade Rochelais depuis trente ans, Vincent Merling quitterait son club de toujours s'il était élu à la tête de la Ligue la semaine prochaine. Qui le remplacerait alors ? Le dirigeant a tout programmé. « Gérer, c'est prévoir, donc tout est organisé pour que le Stade Rochelais ne subisse pas les conséquences de mon départ éventuel, assure-t-il. Je n'ai pas de crainte, j'ai des amis ici prêts à prendre les responsabilités que j'avais, je sais qui me remplacerait à la tête du comité de surveillance. J'en dirai plus à nos supporters et partenaires très rapidement en cas d'élection. Mais le dire maintenant, ça serait faire preuve de prétention. »