Pour les sceptiques de Boudjellal
Envoyé par:
mordus83
(---.cust.tele2.fr)
Date: Sunday 21 October 2007 20:33:47
MOURAD BOUDJELLAL
Président du Rugby Club Toulonnais
Tana : La messe du Messie !!
Gérard Normand : Nous sommes à quelques jours du début de la saison, le
match de Grenoble termine la préparation. Etes-vous satisfait de votre
effectif, du recrutement et de ce que vous avez vu lors des premiers matchs
amicaux ? La Coupe du Monde ne va-t-elle pas indirectement perturber le
début de championnat puisque plusieurs joueurs ne pourront être qualifiés
dans l’effectif du RCT que dans plusieurs semaines ?
Mourad Boudjellal : Nous avions programmé cela, donc ce n’est pas une
surprise. Nous savions qu’en engageant de grands joueurs ils risquaient d’aller
loin dans cette compétition. Donc nous avons géré un certain nombre de
joueurs que l’on savait pouvoir être là très vite et qui nous semblaient pouvoir
défendre les chances du RCT sans aucun problème. Et lorsque les derniers
arriveront, ils vont encore renforcer ce groupe qui, je le pense, aura déjà fière
allure dès le début. Et cela se fera en toute complémentarité sans écarter
personne. On sera au complet contre Oyonnax. D’ici là, ça va laisser la chance
à tous ceux qui ont fait la préparation avec Tana Umaga de pourvoir briller à
Mayol et peut-être d’être titulaire au sein du RCT. Puisque dès le début, notre
langage a toujours été de dire qu’on ne fera pas une équipe de «C.V» mais on
mettra les meilleurs joueurs du moment. On a essayé pas mal de jeunes,
certains sont très prometteurs, ils joueront cette année, ils joueront encore
plus l’an prochain, notre projet est prévu pour plusieurs saisons. Il y a des gens
qui sont là pour nous aider à monter en Top14, d’autres sont là pour nous aider
à nous y maintenir et d’autres pour nous aider à y briller... C’est comme ça que
je vois les choses, donc c’est un projet sur plusieurs années.
Gérard Normand : Est-ce qu’il y en a qui sont là pour former le noyau d’une
équipe pérenne et amener des joueurs au plus haut niveau ?
Mourad Boudjellal : Evidemment certains sont l’ossature de l’équipe de
demain. Je n’ai pas caché que pour moi une recrue comme Victor Matfield c’est
les fondations de la future bâtisse. Etant entendu pour moi que Tana Umaga
en est le grand architecte et c’est lui qui a la responsabilité de construire ce club.
Gérard Normand : Quand Tana est arrivé à Toulon, on a vu naître une espèce
de lune de miel entre vous. Est-ce que vos relations sont toujours au beau fixe ?
Cela va-t-il toujours bien entre vous ?
Mourad Boudjellal : Tout va bien, je lui ai confié l’autorité sportive, on va dire,
la seule fois où je me mêle du sportif c’est pour le recrutement. Et les relations
sont très bonnes avec Tana comme avec tout le staff Tana Umaga, Jean-Jacques
Crenca, Martial Cottin... L’ambiance est excellente, alors évidemment on va
dire «attendez il n’y a pas de match», mais moi j’ai un comparatif l’an passé.
Ce n’était pas aussi bien que cette saison. Aujourd’hui il y a plus de joie, plus de soutien...
Gérard Normand : Quels enseignements avez-vous tiré du match contre Brive ?
Mourad Boudjellal : C’est difficile de tirer des enseignements sur un match, on
était là pour se caler, Brive je pense aussi, alors il ne faut pas s’emballer. On
peut dire que des recrues ont donné satisfaction, quelques jeunes aussi. Mais
on ne juge pas les gens sur un match, ce que l’on cherche c’est qu’ils donnent
satisfaction sur une saison. On en n’est pas là, pour l’instant c’est le pragmatisme
le plus total. Nous avons un objectif mais nous ne sommes pas les seuls à
l’avoir et ça risque de se jouer à pas grand chose et ce «pas grand chose»
j’aimerais bien qu’il tourne en notre faveur. Et moi je me bats pour ce détail,
pour ce «pas grand chose».
Gérard Normand : Dimanche prochain, on rencontre Béziers à Mayol. Béziers
ce n’est pas n’importe qui, comme nous, ils ont l’intention d’aller en Top14.
Vous êtes serein ?
Mourad Boudjellal : D’entrée on va rentrer dans le vif du sujet. On est affaibli
parce qu’il nous manque beaucoup de joueurs et Béziers, qui est un gros
candidat à la montée, vient pour essayer de gagner à Mayol parce qu’ils
doivent se dire que si c’est possible c’est maintenant, parce que l’équipe n’est
pas au complet, parce qu’elle n’est pas encore rôdée, parce qu’elle n’a pas
encore toutes ses habitudes de jeux, qu’elle est encore en recherche et cela lui
permettrait de prendre mathématiquement et psychologiquement un avantage
qui nous mettrait dans le doute. Pour cela nous comptons sur le public de
Mayol, on aura besoin de lui, il faut nous pousser, il faut nous aider et pas
seulement dans les moments d’euphorie, il faudra le faire aussi dans les
moments difficiles. J’espère que l’équipe nous apportera beaucoup de joie,
j’aime la joie de Mayol, j’aime les chants et les explosions du public mais il y
aura aussi sans doute des moments difficiles et nous aurons besoin alors du
16ème homme qui est notre public. Quand le ciel sera à l’orage nous
trouverons notre énergie dans le chaudron de Mayol. Je me suis donné une
double mission : faire un club, un groupe professionnel, et revenir en Top14.
Je crois avoir réussi la première moitié de la mission. Le budget est en place,
avec un nombre de partenaires qui a été multiplié par 2.5 voir 3. Dès cette
année il sera renforcé par les loges. Le problème des véhicules est réglé pour
trois ans. La ville nous a accordé les installations que je souhaitais pour Berg,
300m2 de bureaux pour l’administratif, 200m2 pour le médical, donc de vraies
infrastructures avec une vraie salle de musculation, et puis un effort important
pour la formation. C’est un sujet sur lequel nous avons très peu communiqué
mais nous avons contribué à hauteur de 450.000 euros à la formation et aux
salaires des Espoirs, nous les incorporons chaque fois que c’est possible en équipe
première. Notre projet comprend un volet jeune, il est structuré économiquement
pour nous permettre de garder les jeunes. Dans un paysage où l’échelle des
salaires a complètement explosé, il faut un budget qui nous permette de
garder nos jeunes joueurs. Cela veut dire 12 à 14 millions d’euros si l’on ne veut
pas devenir le centre de formation des autres clubs au lieu de garder les jeunes
chez nous.
Gérard Normand : Cette année les Espoirs vont jouer en «élite». Pensez-vous
renforcer encore les liens entre les «Pros» et les «Espoirs» ?
Mourad Boudjellal : Nous le faisons déjà dans la mesure où ils se sont entraînés
avec les pros pendant la période de préparation. Donc ils devraient être plus
affûtés, plus aguerris, meilleurs. D’un autre côté s’ils sont très bons, on va les
garder, je souhaite en intégrer quelques-uns... Déjà l’entraînement en commun a
changé physiquement et rugbystiquement un certain nombre d’entre eux. Et
je peux vous dire que les entraîneurs ont pour consigne d’avoir un oeil sur ce
qui se passe de ce côté-là. Parce qu’on ne doit pas laisser passer un seul joueur.
Je n’ai plus envie de voir un championnat de France avec des Toulonnais dans
tous les clubs de Top14 et Toulon en ProD2. Mais pour ne pas être pillé, il faut
être économiquement fort.
Gérard Normand : D’accord le brin de muguet ne suffit plus, il faut être solide
économiquement, mais quelquefois un peu d’euphorie, un peu d’enthousiasme
ça aide. Tana Umaga, comme joueur, a montré qu’il avait des dons
d’entraînement dans ce domaine. En aura-t-il autant comme entraîneur ?
Mourad Boudjellal : Je vais vous dire ce qu’un joueur me disait il y a quelques
jours. «Tana Umaga, il ne parle pas beaucoup mais quand il parle, on se
croirait à la messe, on l’écoute de façon religieuse !!» Les joueurs le regardent
comme un «messie» mais derrière cela il y a un très grand professionnalisme.
Rien n’est laissé au hasard, tout est analysé, tout est prévu, les sens du jeu, les
enchaînements, il a réussi à créer avec les entraîneurs une synergie, ils bossent
dans la minutie, ce sont des orfèvres qui nous font du chirurgical de très haute
précision. J’espère qu’on en verra les résultats rapidement...
Gérard Normand : Tout le monde ne partage pas votre point de vue sur l’évolution
du rugby, autant à Toulon qu’en ovalie. Marcel Rufo, l’an dernier, vous
a envoyé quelques banderilles pour vous le faire savoir. Vos relations n’étaient
pas au beau fixe, est-ce que cela a évolué ?
Mourad Boudjellal : On s’est parlé !!... Mais pour l’instant on ne peut pas dire
qu’on est réconcilié ! Marcel Rufo a écrit qu’il s’agissait d’une querelle de famille
et ça m’a fait plaisir parce que je me suis dit : «Au moins, il me considère comme
de la famille...» Donc on peut continuer à se parler, nous sommes sans doute
sur le chemin de la réconciliation. Et j’ai bien compris que si nous montions en
Top14 ça lui ferait autant plaisir qu’à moi !!
Propos recueillis par Gérard Normand
source TELEX du 20/10/07